Facture électronique obligatoire : se préparer à sa mise en application
Depuis le 1er janvier 2020, toutes les entreprises travaillant avec le secteur public doivent émettre leurs factures au format électronique via la plateforme dédiée Chorus Pro. Cette obligation s’étendra progressivement aux transactions entre entreprises privées. Cette mise en œuvre passe par plusieurs échéances, dont la première au 1er septembre 2026. Au 1er septembre 2027, la facture électrique sera obligatoire pour toutes les entreprises.
Cette évolution vise à moderniser les processus comptables, renforcer la transparence fiscale et améliorer l’efficacité des échanges commerciaux. Je vous explique tout ce qu’il y a à savoir et comment anticiper cette nouvelle obligation.
La facture électronique obligatoire : ce qu’il faut savoir
La réforme de la facturation électronique en France vise à moderniser et simplifier les échanges commerciaux entre entreprises. Mais l’objectif premier reste la lutte contre la fraude fiscale, notamment la fraude à la TVA.
Qu’est-ce qu’une facture électronique ?
Aujourd’hui, la majorité des entreprises en B2B éditent leur facture au format PDF et l’envoient par mail à l’entreprise cliente. Il est donc légitime de croire qu’il s’agit d’une facture électronique, contrairement à une facture papier.
Or, la facture électronique portée par la réforme est bien différente. La facturation électronique, ou e-invoicing, consiste en l’émission, la transmission et la réception de factures sous format électronique.
- Pour cela, elle devra respecter un format donné (UBL, CII ou tout format mixte composé d’un fichier de données structurées et d’un fichier image) afin de garantir l’authenticité de l’origine de la facture.
- Être transmise à l’entreprise cliente par l’intermédiaire d’une plateforme de dématérialisation privée partenaire de l’administration.
Bien évidemment, la facture électronique devra toujours comporter les mentions obligatoires d’une facture (numéro de SIREN du fournisseur et du client, date d’émission de la facture, adresse complète de livraison, etc.).
Aussi, la facturation électronique telle que nous l’entendons aujourd’hui ne sera plus conforme.
Quels sont objectifs de la réforme de la facturation électronique ?
La réforme de la facturation électronique entend répondre à quatre objectifs fixés par la Direction générale des Finances publiques dans son rapport « La TVA à l’ère du digital en France » publié en octobre 2020.
- Renforcer la compétitivité des entreprises grâce aux gains de la dématérialisation, notamment la diminution de la charge administrative liée au traitement des factures au format papier.
- Diminuer l’écart de TVA au moyen de recoupements automatisés.
- Améliorer la connaissance de l’activité économique en temps réel, permettant une meilleure anticipation des politiques publiques.
- Faciliter, à terme, les déclarations de TVA par le préremplissage.
Quelles sont les entreprises concernées par la facture électronique ?
L’obligation de facturation électronique s’applique à toutes les entreprises assujetties à la TVA, y compris celles bénéficiant de la franchise en base de TVA, et établies en France. Ainsi, qu’importe le chiffre d’affaires réalisé, la forme juridique ou le régime d’imposition des entreprises, toutes les entreprises devront satisfaire à cette obligation légale. Cela inclut donc :
- les grandes entreprises (plus de 5 000 salariés) ;
- les ETI, entreprises de taille intermédiaire (250 à 5 000 salariés) ;
- les PME, petites et moyennes entreprises (10 à 250 salariés) ;
- les micro-entreprises (moins de 10 salariés) ;
- les auto-entrepreneurs (micro-entrepreneurs).
Même les entreprises n’émettant pas de facture devront avoir la capacité de recevoir les factures électroniques de leurs prestataires, fournisseurs, etc.
Attention, il ne s’agit ici que de la facturation entre entreprises (B2B). En effet, les entreprises B2C facturant des particuliers ou des opérateurs étrangers ne sont pas concernées par la facture électronique. Pour autant, elles sont soumises à l’obligation d’e-reporting de la TVA.
Sans rentrer dans les détails, car je ferai un article dédié sur l’e-reporting (différent donc de l’e-invoicing, facture électronique), l’e-reportingconsiste à transmettre les données des opérations non visées par l’obligation d’e-facturation à l’administration. Les données seront à transmettre par l’intermédiaire d’une plateforme de dématérialisation partenaire de l’administration.
Quand faut-il passer à la facturation électronique ?
Comme je le disais, la mise en œuvre de la réforme est progressive afin de permettre aux entreprises de s’adapter progressivement à cette nouvelle obligation et de mettre en place les outils nécessaires à la dématérialisation de leurs factures.
Un calendrier de mise en application est donc prévu.
- Depuis le 1er janvier 2020, l’obligation de facturation électronique (réception et émission) concerne toutes les entreprises répondant à des marchés publics.
- Au 1er septembre 2026, l’obligation d’émettre des factures électroniques s’étendra aux grandes entreprises et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI).
- Au 1er septembre 2026, l’obligation de recevoir des factures électroniques s’appliquera à l’ensemble des entreprises.
- Au 1er septembre 2027, l’obligation d’émettre des factures électroniques s’entendra aux petites et moyennes entreprises (PME), micro-entreprises et auto-entrepreneurs.
Quelles sont les sanctions en cas de non-conformité ?
En cas de non-respect des obligations liées à la réforme de la facturation électronique, différentes sanctions peuvent être appliquées :
- une amende de 15 € par facture (plafond annuel maximum de 15 000 €) en cas de défaut de facturation électronique ;
- une amende de 250 € (plafond annuel maximum de 15 000 €) en cas de non-respect de l’obligation de e-reporting ;
- une amende de 15 € par facture et de 750 € par transmission (plafond annuel de 45 000 € pour les deux sanctions) en cas de non-transmission des informations à l’administration fiscale par les Prestataires de Services de Paiement (PSP).
Cela étant dit, le risque principal du non-respect de ces obligations serait d’entraver l’activité de l’entreprise, puisque celle-ci ne peut pas émettre ou recevoir des factures électroniques.
La facture électronique obligatoire : anticiper sa mise en place
Comme dans de nombreuses situations, l’anticipation est la clé d’un changement réussi ! Rien de bon ne ressort lorsque l’on s’y prend au dernier moment, sans parler du stress que cela génère. D’autant plus que l’instauration de la facture électronique en entreprise peut prendre plusieurs mois.
L’anticipation passe par le choix des outils les plus adaptés à votre entreprise, l’audit des processus interne, la sensibilisation des collaborateurs, etc.
Étape 1 : faire un audit des processus de facturation actuels
Avant d’adopter la facturation électronique, il est important de réaliser un audit exhaustif des processus de facturation existants. Sinon, comment les adapter ?
L’audit des processus de facturation actuels passe par plusieurs étapes.
- La cartographie des processus : il faut documenter chaque étape du cycle de facturation, de l’émission à l’archivage, afin de comprendre les flux actuels et d’identifier les points d’amélioration.
- L’identification des inefficacités : il faut repérer les tâches redondantes, les erreurs fréquentes et les goulots d’étranglement qui pourraient être éliminés ou automatisés avec la facturation électronique.
- L’évaluation des outils actuellement utilisés : il est important d’analyser les logiciels et systèmes en place pour s’assurer qu’ils sont compatibles avec les exigences de la facturation électronique. C’est également l’occasion de vous vérifier qu’ils sont bien à jour.
- La mise en conformité des factures : au-delà des mentions légales obligatoires à faire figurer sur les factures, 4 nouvelles mentions légales devront apparaître sur les factures électroniques (le numéro de SIREN/SIRET du client, la mention de livraison de biens ou de prestation de services, l’adresse de livraison de la marchandise et l’option de « TVA d’après les débits »).
Pour vous aider à mener cet audit, plusieurs questions sont à se poser, comme :
- combien de clients et fournisseurs a l’entreprise ? ;
- combien de factures émet ou reçoit l’entreprise ? ;
- quels sont les changements à opérer pour répondre aux exigences de l’e-invoicing ? ;
- quelles sont les factures concernées par la réforme en fonction des formats et canaux d’envoi actuel ? ;
- la base de données des fournisseurs et clients est-elle à jour et comprend-elle toutes les informations obligatoires de la facture électronique ? ;
- qui est chargé de la gestion des factures dans l’entreprise ? ;
- etc.
Étape 2 : choisir une solution compatible et former les équipes
Une fois l’audit réalisé, vous disposerez de tous les éléments nécessaires pour choisir une solution de facturation électronique adaptée. Bien évidemment, cette solution doit être conforme aux réglementations en vigueur, sécurisée et compatible avec les systèmes existants dans l’entreprise.
Pour transmettre et recevoir des factures électroniques, les entreprises devront donc choisir une plateforme parmi la liste des Plateformes de Dématérialisation Partenaires (PDP) proposées par des opérateurs privés reconnus par l’État. Ces plateformes comprennent l’ensemble de fonctionnalités obligatoires.
Les plateformes sont en mesure d’échanger les informations entre elles. Autrement dit, il n’est pas obligatoire d’utiliser la même plateforme que celles de ses clients (ou inversement).
Vous vous en doutez, mais la formation des équipes est essentielle que ce soit pour l’utilisation de la plateforme, la sensibilisation aux nouvelles obligations, etc.
Bon à savoir : le projet du Portail Public de Facturation (PPF) mis en place par l’AIFE (Agence pour l’Informatique Financière de l’État) et régi par l’administration fiscale, afin de fournir un service de facturation électronique gratuit aux entreprises a été abonné par le gouvernement en octobre 2024.
Comme vous le constatez, la nouvelle obligation portant sur la facture électronique n’est pas une chose à prendre à la légère par les implications qu’elle représente pour les entreprises. C’est pourquoi sa mise en œuvre est progressive. Vous comprenez donc la nécessité d’anticiper ce changement significatif. Nous vous conseillons également de désigner un référent en interne pour piloter et superviser les différentes étapes du projet.